J'écris donc je suis.

Par cette ligne commence mon acte créateur, la réalisation tangible de mon être.

Poussé par la nécessité de produire une nouvelle information rapidement, je choisis le langage de l'écriture. Un monde derrière chaque mot, une construction de sens, une cité sémantique.

Lecteur, toi qui donne vie à mon être, ne te contente pas de survoler ma page, autorise toi l'atterrissage. Le plus surprenant se cache entre les mots, dans les silences, après la percussion de chaque terme intervient la latence de l'esprit qui cogite. Les mots sont importants. Mes phrases sont uniques. Personne n'a jamais réalisé cette combinaison de caractères avant moi.

Pourtant, beaucoup ont initié leur acte créateur avec une intention similaire.

Ils voulaient exister au delà d'eux mêmes. Conscients de leur immense pouvoir : La téléportation. Les créateurs peuvent rejoindre leurs pairs au delà de la chair.

Gravant la pierre avec frénésie, maniant la plume tout en élégance, frappant le clavier avec l'attention d'un archer sur le point de décocher son ultime flèche.

Les mots peuvent nous porter, nous épauler, nous soutenir. Tels des compagnons de voyage auxquels nous confions les plus lourds bagages, ceux qui obstruent notre vision, pèsent sur nos vertèbres, cognent contre nos côtes à chaque pas. Nous les invoquons tels des créatures, à voix haute ou dans les tréfonds de nos ruminations. Et ils sont là.

Parfois, ils n'attendent pas d'être appelés pour venir, on appelle ça l'inspiration, l'obstination, la folie. Lorsque les silences se font rares dans les rues de notre esprit, encombrés par un trafic de monstres cherchant tous à gouverner notre prochain acte, il est temps d'intervenir et de mettre un terme à cette cacophonie.

Partir donner rester confiance histoire raconter créativité peur argent connerie temps pourquoi elle je nous vous il local nature apogée congruence apologie innovation territoire fatigue peur sentiments joie reconnaissance je dois faire je ne dois pas faire je dois faire je suis seul que dois-je faire suis-je assez suis-je insuffisant qu'en pensent-ils non oui non oui non oui non oui non.

Reconnaître que notre dialogue intérieur déraille.

Pour le remettre en piste, laisser les mots couler ou bien les dompter et n'appeler que ceux qui nous sont chers, être un peu trop sévère pour qu'ils comprennent une bonne fois pour toute. Une bonne fois pour toute.

Une

Bonne

Fois

Pour

Toute

Les mots s'impriment dans ton cerveau, occupe l'espace, et tu te laisses bercer par les lignes qui défilent sous tes yeux. Tu aimes quand les mots sont doux, qu'ils te rappellent des souvenirs heureux, des couleurs, du rouge, du vert, du bleu, des odeurs de chocolat, de fleurs ou de tarte qui sort du four.

Écrire est un acte magique.

La plume s'aiguise en écrivant.

Si parfois ton esprit s'embrume, ouvre la fenêtre et laisse filer ces pensées pour qu'elles rejoignent la réalité. Donne à tes yeux la satisfaction de pouvoir te lire, le plaisir de la structure, le bonheur de pouvoir décider du rythme. Remonter la page, ajouter une virgule.

Et même si les mots sont durs, si la violence et la cruauté baignent dans des torrents de corps sanguinolents, laisse les sortir et regarde les vivre hors de toi.

Une pensée écrite sera peut être moins virulente, alors donne lui sa chance.

Et écris.